Ordonnances Macron : du nouveau en matière de rupture du contrat de travail
Publié le 11.04.2018
Les ordonnances Macron, publiées le 23 septembre 2017, ont apporté un certain nombre de modifications concernant les ruptures des contrats de travail, allant jusqu’à créer de nouveaux modes de rupture. Voici les dernières nouveautés en la matière…
Salariés protégés : une fin de CDD toujours autorisée ?
Par principe, la rupture du contrat de travail des salariés protégés en vertu d’un mandat (délégué syndical, membre du comité social et économique de l’entreprise ou interentreprises, représentant de proximité, conseiller prud’homme, etc.) est soumise au contrôle de l’inspecteur du travail.
L’échéance du CDD ne fait pas exception.
Jusqu’alors, l’employeur devait saisir l’inspecteur du travail un mois avant le terme du contrat d’un salarié protégé, ce qui posait problème dans les cas de recours aux contrats plus courts.
Depuis le 1er avril 2018, l’employeur doit saisir l’inspecteur du travail, qui doit se prononcer avant le terme du CDD. Aucun délai n’est ainsi imposé.
Une spécificité est toutefois prévue pour les salariés protégés embauchés en CDD saisonnier : depuis le 1er avril 2018, l’employeur doit saisir l’inspecteur du travail dans les cas où :
- il souhaite rompre par anticipation le CDD ;
- il ne souhaite pas renouveler le contrat, en dépit d’une clause de reconduction prévue par le contrat de travail ou par un accord collectif.
Cela signifie que l’autorisation de l’inspecteur du travail n’est pas requise lorsque le CDD saisonnier arrive naturellement à son terme.
Notification du licenciement : de nouveaux modèles de lettres ?
Pour limiter le nombre de contentieux liés aux irrégularités de procédure de licenciement, le Gouvernement a diffusé des modèles de lettre de licenciement.
Ces modèles devaient préciser les droits et obligations des parties alors que ces éléments ne sont pas impératifs lorsque les modèles ne sont pas utilisés. C’est pourquoi, depuis le 1er avril 2018, cette précision n’est plus mentionnée dans la Loi.
Licenciement économique : une procédure révisée ?
Depuis le 24 septembre 2017, les difficultés économiques justifiant un licenciement pour motif économique s’apprécient :
- au niveau de l’entreprise lorsqu’elle n’appartient pas à un groupe ;
- au niveau du secteur d’activité commun à l’entreprise et aux autres entreprises du groupe établies sur le territoire national.
Depuis le 1er avril 2018, la Loi précise qu’en cas de fraude, le juge pourra apprécier les difficultés économiques de l’entreprise au niveau du groupe international.
Enfin, lorsque l’employeur envisage le licenciement d’au moins 10 salariés sur une période de 30 jours, le comité social et économique (CSE), lorsqu’il existe, peut décider de recourir à une expertise portant sur la santé, la sécurité, les domaines économiques et comptables ainsi que les effets qu’un tel projet pourrait avoir sur les conditions de travail.
Indemnités prud’homales : le barème toujours applicable ?
Pour les licenciements prononcés depuis le 24 septembre 2017, lorsqu’un licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, le juge peut tenir compte des éventuelles indemnités de licenciement qui ont été préalablement versées au salarié pour fixer le montant des indemnités, dans le respect d’un barème.
Depuis le 1er avril 2018, la Loi précise que l’indemnité légale de licenciement n’a pas à être prise en compte. Seules les indemnités de licenciement d’un montant supérieur à l’indemnité légale peuvent être prises en compte.
Par ailleurs, le barème d’indemnisation n’est pas applicable au cas où le licenciement serait déclaré nul (licenciement prononcé pour un motif discriminatoire, par exemple). Mais il existe d’autres ruptures du contrat de travail qui sont susceptibles de produire les effets d’un licenciement nul : la résiliation judiciaire du contrat de travail et la prise d’acte de la rupture aux torts de l’employeur. Dans pareil cas, l’indemnisation du salarié ne sera pas non plus soumise au barème.
Accords de compétitivité : un dispositif précisé ?
Les accords qui permettent de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou de préserver ou de développer l’emploi, baptisés par la pratique « accords de compétitivité », s’appellent désormais « accords de performance collective ».
Les accords de performance collective définissent dans leur préambule leurs objectifs. Ils peuvent contenir :
- les modalités d'information des salariés sur son application et son suivi pendant toute sa durée, ainsi que, le cas échéant, l'examen de la situation des salariés au terme de l'accord ;
- les conditions dans lesquelles fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant toute sa durée :
- ○ les dirigeants salariés exerçant dans le périmètre de l'accord ;
- ○ les mandataires sociaux et les actionnaires, dans le respect des compétences des organes d'administration et de surveillance ;
- les modalités selon lesquelles sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés ;
- depuis le 1er avril 2018, les modalités d'accompagnement des salariés ainsi que l'abondement du compte personnel de formation au-delà du montant minimal (actuellement fixé à 100 heures).
Ces accords peuvent être conclus depuis le 1er janvier 2018. L’employeur devait alors communiquer dans l’entreprise sur l’existence et le contenu de l’accord.
Depuis le 1er avril 2018, l’employeur doit informer chaque salarié, non seulement de l’existence et du contenu de l’accord, mais aussi de son droit d’accepter ou de refuser l’application des dispositions de cet accord à son contrat de travail. Cette information doit être effectuée par tout moyen conférant date certaine et précise (idéalement par lettre recommandée avec AR ou remise en main propre contre signature).
Notez que, depuis le 1er avril 2018, les conventions de forfait en jours ou en heures sur l’année peuvent être modifiées par un accord de performance collective, sans qu’il ne soit nécessaire d’obtenir l’accord individuel du salarié. Ce dernier peut toutefois refuser l’application de l’accord collectif à son contrat de travail.
Si le salarié (qu’il soit soumis au forfait ou non) refuse l’application de l’accord, l’employeur dispose d’un délai de 2 mois pour engager la procédure de licenciement. Pour rappel, ce refus constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Congé de mobilité : pour tous ?
Le congé de mobilité a pour but de favoriser le retour à un emploi stable d’un salarié par des mesures d'accompagnement, des actions de formation et des périodes de travail (qui peuvent être accomplies au sein ou à l’extérieur de l’entreprise).
Depuis le 23 décembre 2017, le congé de mobilité peut être proposé par toutes les entreprises ou groupes :
- d’au moins 300 salariés ou, s’agissant des entreprises communautaires (qui emploient au moins 1 000 salariés dans la communauté européenne ou dans l’espace économique européen), d’au moins 150 salariés employés en France ;
- qui ont conclu un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (Gpec).
Depuis le 1er avril 2018, le dispositif du congé de mobilité est encore étendu aux entreprises qui ont conclu un accord de Gpec, quel que soit leur effectif, et à celles qui ont conclu un accord portant sur la rupture conventionnelle collective.
Rupture conventionnelle collective : remaniée ?
Depuis le 23 décembre 2017, lorsque l’employeur envisage de réduire ses effectifs dans le cadre d’une rupture conventionnelle collective, il invite ses délégués syndicaux à négocier sur le sujet. Il doit informer la Direccte de l’ouverture des négociations.
L’accord doit contenir un certain nombre de mentions obligatoires, parmi lesquelles, depuis le 1er avril 2018 :
- la durée pendant laquelle les ruptures de contrats en application de ce dispositif peuvent intervenir ;
- les modalités de conclusion d’une convention individuelle de rupture entre l’employeur et le salarié ainsi que les modalités d’exercice du droit de rétractation des parties ;
- les mesures visant à faciliter le reclassement externe des salariés sur des emplois équivalents, telles que le congé de mobilité, des actions de formation, de validation des acquis de l’expérience, etc.
Il ressort de ces derniers aménagements qu’il est possible de proposer un congé de mobilité dans le cadre de la rupture conventionnelle collective (RCC). Dans ce cas, lorsque l’employeur accepte la candidature d’un salarié à la RCC, son contrat de travail est rompu d’un commun accord, à l’issue du congé de mobilité.
L’accord portant RCC est transmis au directeur de la Direccte qui va vérifier sa conformité c’est-à-dire qu’il va s’assurer que les modalités de négociation ont été respectées, que les clauses obligatoires y figurent effectivement. Mais en plus, depuis le 1er avril 2018, il doit vérifier le caractère précis et concret des mesures visant à faciliter le reclassement externe.
En cas de refus de validation par le directeur de la Direccte, l’employeur devait, entre le 23 décembre 2017 et le 31 mars 2018 inclus, présenter une nouvelle demande après y avoir apporté les éléments nécessaires et informé le CSE, s’il souhaitait poursuivre son projet.
Depuis le 1er avril 2018, un nouvel accord doit être négocié, si l’employeur maintient son projet. Le CSE doit alors être informé de la reprise de la négociation. Le nouvel accord devra tenir compte des éléments qui ont motivé le refus puis être adressé au directeur de la Direccte qui se prononcera dans les mêmes conditions que pour toute demande initiale.
Source : Loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social, articles 2, 11 et 22
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